À l’occasion de la 10ème Journée des Maires et des Présidents d’Intercommunalité du Pas-de-Calais, organisée par l’AMF62 le 2 octobre 2025 à Calais, un débat riche et concret s’est tenu autour du thème des communes nouvelles.
Animée par Françoise Rossignol, Secrétaire Générale de l’Association, ce débat a réuni Matthieu Demoncheaux, Maire d’Hesdin-la-Forêt, Françoise Vasseur, Maire de Bellinghem, et Jean-Marc Vasse, Maire de Terre-de-Caux (Seine-Maritime) et représentant de l’AMF au niveau national sur ces questions.
Un outil au service de projets communs
En introduction, Françoise Rossignol a rappelé que la démarche de création d’une commune nouvelle devait avant tout être portée par un projet partagé et équilibré. Rebondissant sur le témoignage de Mme Vasseur, elle a souligné que « la clé de la réussite repose sur un vrai souci d’équilibre, d’attention aux détails symboliques et d’accompagnement technique et financier adapté ».
Pour Jean-Marc Vasse, l’outil des communes nouvelles s’inscrit dans une dynamique historique de coopération locale. Ayant lui-même conduit la fusion de plusieurs communes pour créer Terre-de-Caux, il a retracé les motivations qui ont guidé sa démarche. La commune nouvelle, c’est d’abord une pluralité, un passage du “mes installations” au “nos installations”. C’est une vision partagée, un projet collectif.
Il a rappelé que la réussite de son projet reposait sur un long travail de concertation, une décision collective des conseils municipaux, et surtout sur une conviction : le renforcement mutuel entre bourg et villages.
L’école, pilier d’un projet commun
Les interventions ont mis en évidence le rôle central de l’école dans la cohésion territoriale.
Pour Jean-Marc Vasse, le véritable enjeu, c’est le projet scolaire. Le nombre d’enfants est un indicateur plus pertinent que le nombre d’habitants. Dans sa commune nouvelle, d’importants investissements ont été engagés pour moderniser et regrouper les écoles, répondant ainsi aux besoins des familles et des enseignants.
De son côté, Matthieu Demoncheaux a souligné combien les jeunes générations et les agents communaux étaient les vecteurs de cette construction identitaire. Selon lui, il faut que les enfants s’approprient la commune nouvelle. Et il faut associer les agents, car les élus passent, mais les équipes restent.
À Hesdin-la-Forêt, la préparation en amont, avant même la signature de l’arrêté préfectoral, a permis d’harmoniser les services et d’assurer une transition réussie.
Identité et proximité : des repères à préserver
La question de l’identité locale demeure sensible. Les maires délégués jouent un rôle clé dans le maintien du lien de proximité.
Matthieu Demoncheaux a insisté sur leur importance : « ce ne sont pas des postes symboliques ». Ce sont des relais essentiels entre les habitants et la commune nouvelle, une forme de proximité renforcée.
Pour Françoise Vasseur, l’expérience de Bellinghem, issue de la fusion de deux communes, montre que l’identité se construit aussi par la concertation et le respect des équilibres :
Elle a également évoqué les questions de gouvernance et de parité, notamment dans les petites communes où l’application des nouvelles règles électorales impose des adaptations parfois délicates
Des mutualisations réelles, mais des équilibres financiers à consolider
Abordant les conséquences financières, les intervenants ont mis en avant la double réalité des communes nouvelles : des opportunités de mutualisation mais aussi des coûts initiaux significatifs.
Jean-Marc Vasse a détaillé les mécanismes complexes liés à la dotation globale de fonctionnement (DGF) et à l’intégration intercommunale. Une fusion coûte toujours de l’argent au départ. Il faut être attentif aux effets de seuil et aux mécanismes de dotation. Grâce à l’action de l’AMF, « nous avons obtenu que les communes nouvelles ne puissent plus percevoir moins que la somme des dotations de leurs communes fondatrices ». Il a également rappelé le rôle déterminant de la dotation d’amorçage, indispensable pour lancer les premières harmonisations.
Matthieu Demoncheaux a confirmé ces enjeux. « La dotation d’amorçage nous a permis d’harmoniser nos outils et nos services. Mais la commune nouvelle, ce n’est pas magique : on ne fusionne pas pour faire des économies, on fusionne pour faire plus ».
Un levier d’avenir pour les territoires ruraux
En conclusion, Françoise Rossignol a souligné que les échanges avaient permis de mesurer la diversité des modèles et la richesse des expériences locales. Les communes nouvelles ne sont pas un modèle unique. Elles s’adaptent aux réalités de chaque territoire, mais elles offrent un cadre de projet, de mutualisation et d’identité partagée.
Pour Jean-Marc Vasse, la réussite d’une commune nouvelle s’inscrit dans le temps long : « On ne saura si on a réussi que dans 25 ans, lorsque les enfants auront grandi dans une même commune, avec une même école, une même histoire. »
Ce débat a illustré l’esprit même des communes nouvelles : une démarche volontaire, fondée sur la confiance, la concertation et la vision d’avenir, au service de la vitalité de nos territoires.
